Disparue

La nuit était belle, je ne pouvais rien dire de plus. Les étoiles brillaient intensément, formant de multiples dessins et constellations, l'air était doux, et son parfum envoutant. Je m'étais déchaussée pour apprécier à sa juste valeur tous les petits plaisirs de la nature, à savoir dans ce cas-ci la délicatesse de l'humus et de la mousse, les petites piqures des aiguilles de pin sur la plante de mes pieds. J'étais uniquement vêtue d'une longue robe de soie violette qui me couvrait jusqu'aux chevilles. Mes cheveux étaient détachés et se paraient de reflets argentés sous le halo de la lune. J'étais d'ailleurs totalement enveloppée de cette brume blanche, résultat de la rencontre entre les courants d'air, les rayons de la lune et de la rosée en suspension dans l'air.
Je me dirigeai vers une rivière claire où nageaient quelques poissons colorés, et entrai dans l'eau, sans prendre le temps de me délester de ma robe. Quel bonheur que de savourer la caresse de l'eau sur sa peau, de sentir sa fraicheur mouiller ma nuque et mes cheveux. Un sable fin et blanc tapissait le fond. Je plongeai sans provoquer d'éclaboussures et y apposai ma main. Eau et Terre. Je sortis de l'eau, après être remontée à la surface. Ma robe de soie me collait à la peau, dessinant avec précision chaque courbe de mon corps. Le vent me paraissait plus froid. Air. La sensation s'accrut doucement. Puis je me rendis compte que les étoiles avaient disparu. Il était pourtant encore nuit noir. Mes yeux de novice discernèrent des ombres dans l'obscurité pénétrante, des ombres mouvantes et effrayantes. Mon cœur s'emballa, le sang pulsait à mes tempes, puis ce fut l'explosion. Il rampait comme des serpents multicolores, accaparant mon attention. Étais-je en train de rêver ? Ce spectacle magnifique aurait rendu si stupéfait un humain qu'il n'aurait entendu le craquement de la branche. Mais j'étais une novice. Je me retournai vivement. J'eus à peine le temps de sentir la présence d'un inconnu devant moi qu'il me sautait à la gorge. Un bâillon fut placé dans ma bouche ainsi qu'un sac sur ma tête. Il me souleva et mes cris restèrent étouffés.
- Je te tiens ! Tu ne m’échapperas pas, Thanatos me l’a promit !
Nous nous enfonçâmes dans la forêt de Nyx, sous le regard des étoiles réapparues – que je ne pouvais voir - et je disparus de l'enceinte de la Maison de la Nuit...